Il est des personnes dont on ignore l'existence. Des gens qui œuvrent en toute discrétion. Ces vies passées dans l'absolue indifférence, et qui font souvent place à l'oubli pour l'éternité...
L'histoire de Charlie Payet en est l'illustration...
Ne faisons plus comme si ces gens n'avaient jamais existé.
C'est dans les années 30 que le boxeur Charlie Payet, faute de Challenger sur son île de la réunion, s’entraîne contre le tronc du plus gros tamarinier de Salazie. Les jours d'entrainement, la cime de l'arbre dansait allègrement, laissant tomber ses fruitsici et là, sur la terre battue par le boxeur aux pieds nus.
Cela arriva rapidement aux oreilles d'un manager peu scrupuleux. Contre le tour du monde des rings il lui promitfortune et retour triomphal. La fortune arriva, victoire après victoire. Le retour fut quant à lui reporté, de promesses en promesses .
Mais l'argent sans les personnes qu'on aime à ses cotés, c'est accepter de vivre en souriant , sans rigoler.
Charlie voulait tout arrêter, et retrouver les siens, son île, son tamarinier.
Le manager acceptait de le laisser, s'il atteignait les 100 victoires.
Et c'est en voyant cette affiche le soir du 101e combat, que Charlie comprit que ça ne s’arrêterait jamais.
Et qu'il lui fallait perdre pour enfin gagner
Tourner le dos à son passé
Tout lâcher, se résigner
Mais les héros ne savent pas lâcher, et quand ils lâchent ils ne savent pas tomber.
La joue plaquée contre le bois, dans la chaleur torride de la salle de boxe, et sans doute sous l'effet de l'hypoxie , Charlie, ..., un instant, se retrouva une dernière fois près, tout près de son tamarinier.
Si vous allez à Salazie, cherchez la foret, qui est sortie de la terre battue, autour du plus grand tamarinier de l’Île. Et si vous ne la trouvez pas , demandez l'arbre de Charlie. ici tout le monde le connait.
Cette histoire est donc celle vous l’aurez compris de l’homme aux 101 victoires, sans aucun doute.
Comme nous les secrets ont un début, une existence, et une fin.
Dans la bibliothèque de la maison de mon enfance, j’avais pour habitude de parler avec Esther. J’avais l’impression de la connaitre depuis toujours, Je ne me rappelais plus comment nous nous étions rencontrés. Sa présence m’apaisait et c’était suffisant.
Un jour d’automne Esther me confia son secret.
Sa sœur jumelle Leen qui avait succombé dans l’incendie de leur chambre lui murmurait toujours des mots à l’oreille. Elle était son réconfort.
Nous avions fini par convenir de cette présence. Je crois même que parfois, il me semblait la distinguer.
Et puis il y eu ce jour d’Automne brumeux ou je ne trouvais pas Esther dans la bibliothèque, comme chaque soir… Inquiet je la cherchais et c’est près de l’escalier menant à la chambre d’enfant que je la trouvais en compagnie de Leen.
Elle n’était déjà presque plus là.
Et je ne la revis plus jamais.
J’appris bien plus tard qu’ici même deux jeunes jumelles avaient péri dans l’incendie de leur chambre.
Ainsi, je voyais les fantômes...
Aujourd’hui je vous livre ce secret et je me pose la question :
« Vous ! Me voyez-vous encore ? »
Le magicien (ne vous l’ai-je encore présenté ?) illumina d’un geste un chemin au bout duquel une silhouette apparut éclairée par la lune. Une lune omniprésente qui soulignait outrageusement l’absence d’étoiles. Le musicien à la trompette (celui que j’avais vu près de la roulotte) se mit alors à jouer…
Nous tendions l’oreille mais n’entendions rien.
A peiner, nos yeux se plissaient comme pour venir en aide à ces oreilles défaillantes…
Toujours rien…
Peu à peu nos yeux s’ouvraient puisqu’aucun son ne sortait.
C’est là que nous vîmes sortir de la corne de cuivre, des poussières d’étoiles qui venaient trouer le ciel noir. A la fin de cette mélodie silencieuse, je n’avais jamais vu le ciel ainsi paré.
De toute ma vie je ne l’ai d’ailleurs pas revu ainsi.
Parfois au bord de la fenêtre les soirs où il n’y a pas d’étoiles je ferme les yeux, et j’entends la mélodie silencieuse d’Octave. Il arrive parfois alors qu’en les rouvrant quelques étoiles pointent alors, me laissant croire que le cirque oublié est encore là, quelque part ...
J’ai soudainement revu la lumière, éblouissante, mais froide.
Je ne devais cette libération qu’a un improbable déluge, qui avait lessivé cette terre fraîchement retournée.
Quelques images me reviennent, comme des décharges électriques violentes…
Je ne reverrai plus les miens,
je pleure…
Une croix en bois, un vulgaire caillou, comme une recherche d’absolution…
Je commence à comprendre et J’enrage. Je vais te retrouver mon bourreau et te faire pleurer
…
à ton tour
…
Et j'irai m'allonger au pied du long caillou où je jouais enfant…
Cette histoire m'a été soufflée par la dame blanche que j'ai pu photographier à l'aide de la boite magique, reçue un matin de septembre, sur le pas de ma porte.